Appels du pied et chaussures de tango

Récit de Laurent de Chanterac, professeur de tango

This post is also available in English. So you have a choice. N’est-ce pas?

Christine Caminade et Laurent de Chanterac

Au cours de nos apprentissages, entre facilités et difficultés, nos efforts sont parfois compensés, parfois contrariés. Jusqu’où sommes-nous capables de nous investir pour réussir?

Voici le témoignage de Laurent de Chanterac, qui se présente comme professeur de tango argentin depuis plus de 20 ans, même s’il insiste tout de suite sur la diversité de ses autres expériences, et souligne la possibilité permanente d’un changement à venir. Ici, il revient sur un parcours d’apprentissage qui passe par des activités qui le poussent à penser et à s’exprimer par le physique. Son récit nous rappelle que, dans la vie d’un individu, il s’agit parfois de chercher son chemin, et parfois de répondre aux appels du pied qu’on nous faits pour aller vers l’inattendu.

Apprendre à marquer les buts et gérer les notes

Laurent de Chanterac aime parler de l’apprentissage. Mais est-ce qu’il aime apprendre?

LDC – Ça dépend de la personne que j’ai en face de moi. Tout petit, à 3 ans, j’ai un ballon entre les pieds. Mon papa joue au football, je suis dans un milieu de joueurs, et je vais passer des heures à taper dans un ballon. C’est une sorte d’apprentissage, mais c’est même pas un effort. C’est comme ça. La vie va me propose ça quand je suis bout de chou, et je vais passer des heures à jouer seul dans les cages à essayer de toucher les poteaux.

Source – Unsplash

Avec un père et deux oncles qui jouent et s’occupent d’organiser des équipes, de former les jeunes, il n’a pas eu a choisir le football. Il suffit de jeter un œil sur l’article de La Dépêche du Midi qui fête les 40 ans du club US Brens près de Gaillac dans le Tarn, pour mesurer la passion du football qui anime la famille de Chanterac depuis plusieurs générations.

LDC – Avec l’arrivée du ballon rond, pour la première fois, je serai amené par la vie vers des endroits que je n’avais pas forcément prévus.

Il répond à ce premier appel du pied et trouve sa place naturelle comme joueur attaquant.

LDC – J’étais plutôt créatif. Et les défenseurs n’aimaient pas ça. Je n’ai jamais été trop dans l’agressivité mais, quand on me donnait les coups, je faisais les petits ponts. C’était de la provocation de ma part, je l’avoue, mais il fallait répondre quand c’était vraiment costaud en face.

En ce qui concerne les études, sa famille y croit. Sa mère est professeur d’espagnol, son père est ingénieur agronome et va devenir agriculteur par la suite, et sa grand mère était professeur de français.

LDC – J’ai le terrain de foot à 10 mètres de la maison. Ce qui veut dire que le soir, au retour de l’école, je vais sur le terrain. Je ne suis pas travailleur. Je suis le meilleur footballeur de l’école, donc, je n’ai aucun souci avec la vision des autres. Bon élève, pas bon élève, c’est pareil pour moi. Je me contente de mes acquis.

Cahier de brouillon – Un vrai ou un faux?

Mais comment prendre appui sur ses acquis s’il ne travaille jamais?

LDC – Avec le recul, je dirais que ça se fait par imprégnation. J’assiste aux cours, j’attends la récré pour aller jouer au football, évidemment! Il faut travailler un peu pour avoir les notes, donc je travaille un peu. Mais je suis filou aussi, et un peu tricheur. Pour tout dire, à l’époque, j’ai un faux cahier de brouillon où je vais recopier les cours pour m’en servir pendant les contrôles, et je vais toujours me débrouiller pour ne pas me faire prendre.

Avec ce un système d’anti-sèches, il s’arrange pour avoir des notes convenables. Ainsi, il maintient son profil scolaire juste au dessus de la moyenne de 10/20, sans me faire remarquer, tout en faisant attention pour ne pas se faire prendre comme tricheur, parce sa mère enseigne l’espagnol à Gaillac dans le collège où il est élève.

Quelques professeurs passionnants

LDC En même temps, je croise des figures de professeurs qui me parlent. Et là, je ne triche pas. Là, je travaille. C’est une question de rencontre. En fait, je réagis à ce qu’on me propose. Si je dis ça, c’est parce que souvent on me propose d’apprendre des choses par cœur, une sorte d’ingurgitation de choses à retranscrire. Mais je ne vois pas trop l’intérêt de régurgiter comme ça. C’est une perte de temps.

Parmi ces rares exemples de rencontres, il y a un professeur d’histoire-géographie.

LDC En histoire-géo à 11 ans, j’ai un prof passionnant ! Je ne sais pas pourquoi, parce que là, il nous demandait d’apprendre par cœur une sorte d’arbre généalogique. Il nous mettait l’Histoire du Monde devant nous. Et ça, j’ai appris par cœur. Parce que, en le regardant, je me suis dit : Ah d’accord, les hommes préhistoriques il sont là. En 476, c’est la chute de l’Empire Romain... Je m’en souviens encore. Et là, je travaillais. Je n’ai jamais triché dans son cours, parce qu’il s’agissait de comprendre le monde. Çà m’intéressait, donc je mémorisais.

Parce que, contrairement aux apparences, Laurent aime mémoriser.

LDC – Je suis un diesel par rapport à l’apprentissage. En fait, je lis, je lis et je mémorise par imprégnation. Comme on va voir plus tard, j’ai été comédien. Le métier de comédien, c’est encore différent, parce que ça nécessite d’avoir un non fixité par rapport à ce que tu mémorises pour le dire plus tard.

Pour mémoriser des faits historiques à restituer, la mémorisation par imprégnation suffit. Mais un comédien qui s’approprie un texte pour le jouer sur scène va laisser une souplesse à sa mémorisation que Laurent appelle la non-fixité.

LDC – Par non-fixité, je veux dire que, sur scène, ça va être différent tous les soirs. Tu vas apprendre un texte, mais tu ne peux pas l’apprendre de manière définitive pour le dire avec un ton définitif. Un texte à jouer est fait de plusieurs sonorités, plusieurs rythmes. Le dire est un acte physique donc tout doit rester mobile.

Le Corbeau et le Renard – Wikipedia

Cette liberté dans l’interprétation d’éléments maîtrisés donne de l’intérêt à l’effort d’apprentissage. Plus tard, Laurent dit s’être servi de cette facette de la mémorisation pour accompagner l’apprentissage du français de son fils adoptif qui va arriver de Colombie.

LDC Je lui apprenais les Fables de La FontaineLe Corbeau et le Renard, par exemple. Je voulais qu’il comprenne que pour dire les premiers mots, Maître Corbeau, la manière de verbaliser chaque phonème, chaque syllabe de chaque mot, peut être modifiée selon l’intention. C’est la texture qui doit te rentrer dans le corps, et c’est à travers ça que tu vas restituer les mots. De cette manière, cet apprentissage devient plus corporel. Donc on se disait les fables en ramassant les noix, on se les disait en criant, on se les disait comme si on se parlait. C’est à dire, avec des intentions.

Photo de Taylor Flowe sur Unsplash

Revenant à sa propre scolarité, il se souvient de sa perception des intentions d’un professeur de mathématiques lors de sa première rentrée au lycée d’Albi en classe de Seconde.

LDC – En maths, c’était compliqué de tricher ! Donc mes résultats stagnent entre 5 et 7/20 de moyenne jusqu’à la fin de mes années de collège. Mais au lycée, je rencontre un prof de maths. Au premier cours, il va au tableau. Il écrit des trucs, puis se retourne vers nous et demande : Qu’est-ce que c’est + infini et – infini ? Puis, il démarre le cours. J’ai entre 15 et 16 ans, et je comprends, pour la première fois de ma vie, ce qu’est + ou – infini en mathématiques. Il nous met un petit x avec des chiffres et il explique que le petit x correspond à une courbe…

Ce professeur semble avoir non seulement des choses à lui dire, mais également une manière de les dire, un ton, qui engagent Laurent, jeune mathématicien quelque peu contrarié jusque-là. C’est une invitation qu’il ne peut refuser.

LDC – Et je me suis passionné pour les maths! Je suis passé de 7 à 14/20. Parce qu’il avait une manière de parler, de mettre dans le concret quelque chose qui était très abstrait.

Il obtient de justesse un Bac A1 (Lettres – Mathématiques)1. Est-ce un clin d’œil à sa grand mère professeur de français? Ou une preuve de fidélité au professeur du +  ou –  infini? Son Bac en poche, Laurent s’inscrit à l’Université de Toulouse en Psychologie.

Faire du théâtre et rien d’autre

LDC – Je viens à Toulouse, et je choisis de faire fac de Psycho parce que je ne sais pas quoi faire d’autre. Je vais au premier cours, au deuxième cours. Je fais une semaine et, au bout d’une semaine, j’arrête.

Rapidement, il décide que les cours magistraux qu’il est censé suivre dans un amphithéâtre avec une centaine de co-étudiants n’ont aucun sens pour lui. Disposant ainsi de plus de temps libre, un appel du pied l’invite à accompagner un ami au cours de théâtre. Ce sera comme toujours la rencontre humaine avec un professeur qui l’emportera : Vinko Viskic, d’origine croate, lui donnera la passion du théâtre. Et au bout d’un an, le théâtre est devenu son activité principale. Comment le dire à ses parents? En leur expliquant qu’il préfère s’inscrire en Philosophie.

LDC – Je suis dépendant de mes parents pour vivre, donc je ne dis rien au sujet du théâtre. Je leur dis juste que Psycho ne me plaît pas trop, que je pense changer pour faire Philo. Alors je m’inscris en Philo. Et là, il y a un prof que je trouve passionnant! Je fais ma deuxième année en Philo. Je réussi les UV2 avec ce prof passionnant, parce que je vais juste à son cours à lui, pas aux autres.

Quand il avoue la réalité de ses résultats à ses parents en fin d’année suivante, il leur annonce aussi un changement de cap. Il veut étudier le théâtre et, comme il abandonne le chemin de l’université, il va s’assumer financièrement en travaillant.

LDC – J’ai vendu des journaux … Mais surtout, j’ai travaillé deux ans comme magasinier. C’était très formateur. J’ai fait des cartons et les palettes aux Éditions Milan. J’ai appris des choses mais, comme toujours, je vivais ça de manière extrêmement décalé. Je savais – et ça, c’est une grande chance – je savais que je faisais ça pour payer mes études de théâtre. Entre temps, le football, c’était fini sur blessure, parce que je me suis fait dégommer et j’ai récolté un problème sévère à la cheville – parce que parallèlement aux cours de fac et de théâtre, je continuais à jouer au foot.

Cette blessure met fin à ses engagements au football, devenu un peu trop sérieux à son goût. Il préfère le garder comme récréation, poursuivant le jeu joueur qu’il aime.

Il travaille aux Éditions Milan, refusant le CDI qu’on lui propose pour conserver la liberté d’un contrat précaire. C’est décidé : son vrai travail, c’est le théâtre.

LDC –  J’apprends mes textes avec les gars dans mon équipe comme public. Des gars qui, pour certains, étaient des repris de justice. L’endroit idéal pour expérimenter le rôle du dealer dans la première scène de la pièce de théâtre “Dans la solitude des champs de coton” de Bernard-Marie Koltès. Par exemple, je pouvais arriver, me pencher vers un collègue, le fixer droit dans les yeux pour dire :  Si tu es là à cette heure et en ce lieu, c’est que tu désires quelque chose que tu n’as pas. Cette chose, moi, je peux te la fournir, parce que si je suis à cette place depuis plus longtemps que toi et pour plus longtemps que toi… Ce rôle que je travaillais à l’époque était en résonance avec le milieu dans lequel j’évoluais. Et je jouais, j’expérimentais le jeu partout. Donc c’était un apprentissage, mais le jeu faisait pleinement partie de la vie. Maintenant, je le vois complètement différemment mais, quand tu es jeune acteur, il n’y a pas de différence entre la vie et le théâtre.

Cela donne parfois des jeux extrêmes.

LDC Il faut dire qu’on était fous. Avec un copain, on jouait une pièce avec une arme où je devais lui mettre un flingue sur la tempe. Pour travailler, on avait nos voitures et aux feux rouges on faisait semblant de se braquer. Un autre exemple? Dire le plus sérieusement du monde à une fille que tu rencontres. Je veux faire ma vie avec toi! Et tu joues. Et ça marche. Dans le sens ou la personne croit ce que tu dis. Car, dans le jeu, l’acteur est d’une sincérité absolue.

Est-ce que vous arriviez à revenir à la réalité ?

LDC – C’est un moment d’expérimentation de la jeunesse et de l’apprentissage du jeu de l’acteur. Parfois tu pars dans des choses complètement incontrôlées, donc il arrive un moment où tu réfléchis. Je me suis rendu compte que, pour ma santé mentale, j’avais besoin d’avoir une limite absolue entre la scène et la vie. Ce qui a fait ce basculement, c’est la maturité et les rencontres avec différents metteurs en scène.

Au départ, sa vision d’un acteur se construit sur le cinéma américain et les acteurs sortis du célèbre Actors Studio pour qui, jouer un personnage, c’est le vivre de l’intérieur. Mais tout le monde n’est pas Brando, De Niro ou Pacino, capables de chercher en eux-mêmes les aspérités qu’ils retranscrivent sur scène, puis de reprendre le cours de leur vie. Il va partir à Paris suivre un stage à l’Atelier Blanche Salant pour chercher sa propre version du jeu d’acteur.

Solange Oswald
Source – Manufacture

Une fois entré dans le métier, tout en travaillant avec la metteuse en scène Solange Oswald, Laurent apprend à séparer ces deux espaces de sa vie.

LDC C’est paradoxalement avec une consigne de jeu où Solange Oswald nous avait demandé de devenir le personnage dès le réveil et de le rester jusqu’au soir que j’ai eu une première prise de conscience de cet endroit où on laisse le personnage à l’extérieur de soi.

Avec l’âge, il observe, un acteur peut apprendre à jouer Roméo sans tomber amoureux de sa partenaire. Il incarne un personnage sanguinaire comme Richard III3 pour le retrouver et le laisser sur scène.

LDC – C’est important de savoir que la scène, c’est la scène, et la vie, c’est la vie. Sinon, il y a une non-écoute de l’autre, parce que dans la vraie vie, si tu joues quand tu es en face de l’autre, ce n’est pas juste. Il y a un endroit pour jouer, et c’est la scène. J’étais en couple avec Christine Caminade, deux comédiens ensemble, et on jouait avec d’autres acteurs. Petit à petit, on réalise qu’on as besoin de stabilité, de limites entre notre vie et la scène.

Il continue à se former. Et dans le théâtre, comme dans beaucoup de métiers, pour évoluer, il faut faire des rencontres.

LDC – J’ai eu la chance de rencontrer Yoshi Oida, l’acteur japonais révélé par Peter Brook. Je l’ai vu dans L’homme qui prenait sa femme pour un chapeau, une pièce extraordinaire et, par la suite, j’ai travaillé avec lui. C’est une révélation et le déclic qui me fait basculer véritablement dans mon jeux d’acteur.

Chez Yoshi Oida, tout passe par le physique. Imaginons que tu dois jouer un vieux. Tu dois traverser la scène en vieux. Dans son livre L’Acteur Flottant, Oida raconte avoir vu au Japon un acteur incarner une vieille femme de manière extraordinaire. Très ému, après le spectacle il est allé l’interroger sur sa préparation pensant découvrir un travail sur les émotions. L’acteur lui répond : C’est une vieille femme, donc je dois faire des pas plus petits que la normale. A peu près soixante dix pour cent de la longueur normale. Pendant que je marche je ne pense à rien d’autre que cela. Selon Oida, c’est le jeux vide de l’acteur qui permettait toutes les interprétations. Lors d’une représentation, l’émotion arrive par ce que l’acteur va donner physiquement. Quand tu te confrontes aux grands textes et aux tragédies, c’est le physique et le texte qui vont t’amener à transcender, et c’est le spectateur qui va ressentir l’émotion.

Avec le théâtre, Laurent a appris l’effort et le rapport au corps. Il a dû s’accrocher pour apprendre. C’est une fois établi comme comédien professionnel qu’il va croiser le tango.

Cheminer vers le tango

Si Laurent de Chanterac se présente aujourd’hui comme professeur de tango argentin, il n’accède pas facilement au monde de la danse. C’est sa compagne, Christine Caminade, qui entre la première dans le tango. Se trouvant dans le creux entre deux projets de théâtre, elle voit un couple danser sur la musique d’Astor Piazzolla à La Maison du Tango à Toulouse. Christine va en cours, rencontre le danseur Plume Fontaine, et ensemble ils travaillent le tango.

Gloria et Rodolfo Dinzel

LDC Et moi, le tango argentin ? Connais pas. La danse, je n’en ai jamais faite. Par contre, le physique ne m’est pas inconnu, puisque j’ai rencontré Yoshi Oida, et parce le théâtre passe énormément par le physique. Christine fait le tango argentin avec Plume, et moi, je suis le spectateur un peu de ça, comme quand on est acteur et on voit les autres jouer. Ils vont faire un stage à Paris avec Rodolfo Dinzel – un séminaire de danse d’un mois – et comme par hasard, le même mois, je fais un stage sur le C’hi dans le travail chorégraphique, théâtral et musical avec Sheau-Fon Lin, une danseuse de l’Opéra de Pékin.

L’aboutissement du mois de stage de tango avec les Dinzel est un spectacle à faire à l’Auditorium des Halles à Paris. Coup de théâtre : 5 jours avant la performance, un des comédiens-danseurs n’est plus disponible. Il y a un texte à dire, de préférence par un comédien. Laurent accepte l’invitation.

LDC – Ce que je ne savais pas, c’est qu’il fallait aussi danser.

Le voilà comédien et … danseur dans un spectacle de tango. Il marche au milieu des danseurs, dit son texte, tout sauf à l’aise. Le public ne s’aperçoit de rien et les retours sont positifs, mais Laurent reste perplexe. Pour le remercier, Rodolfo Dinzel lui propose de suivre un autre stage à Paris.

LDC – Alors je fais le stage. Je n’ai rien compris. Mais que c’est intéressant ! J’ai un sentiment de liberté et je savoure la rencontre avec Rodolfo Dinzel pour qui le tango, c’est une vie, une philosophie.4

Entre contrats au théâtre, Laurent s’arrange pour pouvoir suivre Christine qui part à Buenos Aires avec Plume Fontaine pour continuer de se former. Et il prend des cours de son côté, intensément – la marche, les tours – dans un investissement technique total.

LDC – C’était vraiment physique. Je ne savais pas pourquoi je faisais ça, pendant 3 ans. Parallèlement, je prenais les cours avec Christine et Plume comme profs. Je les suivais partout. Puis, à la rentrée 1999, Plume rencontre la femme de sa vie en Italie et Christine me dit : Je n’ai plus de partenaire. Est-ce que tu peux m’aider ? C’est rétrospectivement que j’ai compris pourquoi j’avais autant travaillé le Tango sans aucune raison apparente. C’est comme si je pressentais que je serais amené à travailler avec elle. La vie a choisi de me diriger vers cette danse, et moi j’ai dit oui par amour pour Christine.

Son obstination à suivre le chemin de tango5 ouvert par Christine prend un tout autre sens. Laurent accepte cette invitation, mais ils décident d’embarquer leurs chaussures pour 2 mois à Buenos Aires afin de se former ensemble et d’établir l’identité de leur couple en tant que danseurs de tango. Au retour, Laurent et Christine fondent la Compagnie A Media Luz, une association qui court toujours.

Laurent de Chanterac et Christine Caminade

LDC – Pendant 7 ans, j’ai fait théâtre et tango mais, petit à petit, le tango a pris le pas sur l’activité de comédien. Les copains, quand ils venaient me voir au théâtre, ils me disaient : Alors le tango ça va ? Je disais : Oui, oui… J’ai eu les deux pendant un temps. Puis, un peu plus de tango. Et finalement, c’était que du tango. La dernière pièce de théâtre que j’ai jouée, c’était en 2007. Depuis plus de 20 ans, avec Christine nous avons donné beaucoup de stages, de cours. On pourrait te parler du fait de travailler ensemble, de vivre ensemble dans le tango argentin, d’être dans les bras l’un de l’autre 24 heures sur 24. On pourra te parler de la fusion. Et maintenant toute notre pédagogie sort de là aussi : ce que c’est que d’être chez soi. Parce que, plus tu es chez toi, plus tu es avec l’autre; et si tu es trop sur l’autre, tu te fais happé par l’autre, et tu te perds toi-même.

Désormais professeur, cet élève si exigeant quant à la qualité de ses enseignants, s’est trouvé une passion pour la transmission. Est-ce qu’il prend appui sur ses propres efforts pour apprendre?

LDC Oui. Je n’oublie pas d’où je viens, mon chemin pour arriver dans le tango. Je suis venu de très loin, parce que je n’en avais jamais fait. Parce que j’ai vu des danseurs magnifiques, mais pédagogiquement décevants : quand tu leur demandes comment faire telle ou telle figure, ils ne savent pas te le dire parce que, pour eux, c ‘est évident. Tout ce que j’ai construit dans le tango, c’est le fruit de mes propres apprentissages. Autant le football m’a été donné – parce que, les moments d’inspiration étaient monnaie courante chez moi – le théâtre, c’était différent, c’était quand même le résultat d’un travail. Et le tango? Avec toute sa grâce, le tango n’était vraiment pas donné. Donc, oui, je reste professeur du tango. Pour le moment.

Récapitulatif de cours par Laurent et Christine
sur un tango classique
Récapitulatif de cours sur une musique moins classique
– le reflet de l’esprit de recherche du couple

Un autre récit d’apprentissage?

Il y a d’autres épisodes dans les Récits d’Apprentissage à découvrir.

Le prochain épisode est déjà disponible ici. Il propose la rencontre avec Alice Pfeiffer qui partage son parcours d’apprentissage où les langues vivantes prennent une place importante, mais qui doivent passer après l’histoire, les sciences politiques et le droit. Elle est passé par plusieurs voies d’études dans plusieurs pays avant de devenir … urbaniste en Bretagne!

Si vous avez une idée de rencontre pour la suite de la série des Récits d’Apprentissage, n’hésitez pas a le dire dans un commentaire ou par le formulaire Contact. Merci!

  1. Baccalauréat Littéraire version 1984-94. ↩︎
  2. UV ou Unités de valeur, désormais appelées UE ou Unités d’enseignement : Chaque semestre à l’université comporte des unités d’enseignement, qui se composent d’une ou plusieurs matières. ↩︎
  3. Richard III est également en vedette dans un autre article sur ce blog. ↩︎
  4. Le système pédagogique développé par Gloria et Rodolfo Dinzel est exposé dans Le Tango : Cette inquiète recherche de la liberté ↩︎
  5. La joile expression chemin de tango est empruntée à Jean Luc Thomas, auteur de Chemins de Tango, 1998 ↩︎

Sign up to receive awesome content in your inbox, every month.

1 Comment

  1. Youtube Converter

    Hello, i read your blog occasionally and i own a similar one and i was just
    wondering if you get a lot of spam comments?
    If so how do you prevent it, any plugin or anything you can suggest?

    I get so much lately it’s driving me insane so any assistance
    is very much appreciated.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

© 2025 GERRY THE KENNY

Design by Paula BearzottiUp ↑